La Tuna de Distrito de Pau



La Tuna,
huit siècles d'Histoire estudiantine

"Groupe d'étudiants habillés de manière très pittoresque qui chantent et jouent de la musique pour ramasser un peu d'argent, s'amuser et voyager".
Voilà, en résumé, une définition très basique de la Tuna telle que nous la connaissons aujourd'hui.
Les plus perspicaces d'entre vous auront certainement déja deviné qu'il s'agit d'une tradition très ancienne.
Pourtant peu de personnes n'en connaissent les raisons d'être, ni les origines, ni les nombreuses transformations qu'elle a connues tout au long de sa longue histoire.
Nous allons donc lever un coin de voile et tenter d'apporter quelques réponses en abordant étape par étape le long processus de maturation de la plus ancienne tradition universitaire au monde : la Tuna.

Index :
  1. Introduction.
  2. X° au XII° siècles : Jongleurs, troubadours, clercs et Goliards : Les précurseurs du genre.
  3. XIII° : La naissance de l'Université.
  4. XIII° au XVI° siècles : Manteistas et sopistas.
  5. XVII° au XIX° siècles : Capigorrones, Correr la Tuna, la fin d'une époque épique.
  6. XX° siècle : La Tuna moderne.

X° au XII° siècles

Jongleurs, troubadours, clercs et Goliards : Les précurseurs du genre

Contexte historique:

La société médiévale d'Europe occidentale est divisée en trois Etats : la noblesse, le clergé et le peuple.
Chacune de ces castes défend ses propres intérêts.
- Monarques et seigneurs féodaux se disputent les pouvoirs politiques et économiques.
- Les différents ordres religieux se disputent les pouvoirs spirituels et intellectuels.
- Le peuple se regroupe en corporations, sortes d'associations visant à développer et la protéger des intérêts d'un même métier, artisanal ou commercial.

Contexte culturel :

La culture est le miroir de la société et la culture médièvale ne fait pas exception :
- Le troubadour se produit dans un milieu exclusivement courtisan. Sa poésie chante le très noble amour courtois ou traite de sujets d'importance comme les croisades, entre autres arguments de haute poésie ou moralisateurs. Elle emploie une langue de prestige : l'occitan et, plus tard, le français primitif, le portugais-galicien et l'allemand. La musique, véhicule de communication poétique, dépend d'un genre qui envahie la liturgie de l'époque : le trope. Ainsi, ces poètes seront appelés : tropadours, puis, troubadours.

- les jongleurs, ou bateleurs, sont les principaux acteurs de la culture populaire, d'où son appelation espagnole "Mester de Juglaría".
Ces artistes parviennent à se procurer un revenu plus ou moins substantiel en divertissant la population de place en place, de village en village et de pays en pays. Ils sont aussi auteurs-compositeurs-interprètes et leurs chansons, en langue populaire, est un extraordinaire vecteur de diffusion pour les nouvelles et la culture de l'époque.

- Quand les clercs ecclésiastiques, gardiens de la culture savante, rigide et austère, découvrent que les jongleurs sont de très bons diffuseurs du message, ils commencent à écrire des poèmes en langue vulgaire pour qu'ils soient chantés sur les places publiques diffusant ainsi l'enseignement moral et religieux.

La Tuna actuelle a été fortement influencée par ces différentes formes culturelles médiévales, mais elle doit son originalité à une création rebelle, dissidente, souvent improvisée dans les tavernes et propre aux "Goliards".

Les clercs ecclésiastiques :

Au Moyen-Âge, l'enseignement est dispensé par l'Eglise.
Un étudiant, même s'il n'a reçu aucun ordre sacerdotal, est donc assimilé à un "clerc" (d'où clergé).
Ce terme équivaut au mot "éclairé" qui sera employé au XVII° siècle, c'est à dire instruit à la clarté du savoir classique (scolasticats) livré par les écoles monastiques par opposition à l'homme non cultivé qui ne connait pas le latin. Par extension il sera appliqué à l'homme savant en général, même païen.
Les clercs sont ainsi les dépositaires non seulement du contenu dogmatique et théologique de cette culture savante, mais surtout de la forme sous laquelle ce contenu est délivré.
Dans la solitude de leurs cellules et le froid des bibliothèques, ces hommes de lettres font montre d'une grande érudition et d'une connaissance consciencieuse des canons de la métrique classique, afin de traduire et de composer les textes savants.
En Espagne, cette culture savante porte le nom de "Mester de Clercía".

Les Goliards, ou "Ordo Goliae", "Secta vagorum", "cleri vagantes", "clerici ribaldi", "clericus vagans", "vagantes ambulatchorus" :

Nombre de ces clercs entrent dans les ordres non par vocation mais pour obtenir un sauf-conduit vers la liberté. Les aspirants prêtres, ayant reçu les ordres mineurs et la tonsure, sont exemptés des obligations envers les pouvoirs séculiers et ecclésiastiques : l'ost (service militaire féodal), les impôts, les tribunaux, etc…
D'origine urbaine, campagnarde et même noble, ces étudiants pauvres font du vagabondage intellectuel, allant de ville en ville pour suivre les cours du Maître de leur choix et pour répandre leur enseignement. On les appelle "clercs errants" ou "Goliards".
Ils échappent aux structures établies et parcourent le pays, de taverne en taverne, et mènent le plus souvent une vie assez dissolue. Ils boivent, jouent, jouissent de tous les plaisirs de la vie. Pour payer leurs consommations, ils composent, chantent et improvisent, en latin, poèmes, complaintes, fabliaux, chansons à boire, jaculatoires, etc ...
Leurs poèmes-chansons célébrent le jeu, le vin, l'amour, glorifient l'hédonisme, renient l'éthique chrétienne, fustigent âprement les travers de la société et remettent en question l'ordre établi.
Evêques, primats, moines et même le Pape, sont l'objet de leurs plaisanteries et moqueries.
A cause de leur caractère subversif, les Goliards sont rapidement mis à l'index.

- En 1140, au concile de Sens, un des noms mythiques de l'Université, Pierre Abélard, entre en conflit avec Saint Bernard, Abbé de Clairvaux. Ce dernier, voyant où soufflent les vents, accuse le professeur Abélard d'être un "Goliat ". Abélard sort du concile en mauvaise posture au regard du droit canon - on jete l'anathème sur plusieurs de ses propositions - mais son prestige intellectuel s'en trouve renforcé.
- En 1227, le concile de Trévise interdit aux prêtres de permettre aux Goliards de prendre part aux chants pendant l'office.
- En 1229, les goliards jouent un rôle manifeste dans les troubles de l'Université de Paris relatifs aux intrigues du légat papal.
- En 1289, il est interdit à tout clerc d'être jongleur, goliard ou bouffon.
- En 1300, à Cologne, il leur est interdit de prêcher ou de s'engager dans le trafique d'indulgence.
Cette législation ne sera effective qu'à partir du moment où les privilèges du clergé leur seront définitivement retirés.

Origine du nom :

L'origine du nom est incertaine et pourrait provenir selon les sources :
- du latin "gula", signifiant gloutonnerie ou gourmandise,
- de "Goliat", nom du géant philistin Goliath de la Bible vulgate, personnifiant le mal et synonyme du démon,
- ou d'une dérivation du français "Gaillard".
- On parle aussi d'un hypothétique Evêque "Golias", aussi appelé "Archipoète" ou "Primas", que les goliards eux-mêmes présentent comme leur plus lointain ancêtre.
Au XIV° siècle, le mot Goliard abandonne toute référence cléricale; pour devenir synonyme de jongleur ou de ménestrel dans la littérature française et anglaise.

Forme et thématique de la poésie goliarde.

La poésie des goliards est parallèle à la poésie latine savante dont elle est une expression plus libre.
C'est une poésie vive, populaire qui représente une attitude nouvelle, innovante, qui s'éloigne radicalement de celle composée jusqu'alors dans les monastères.
Elle suppose pourtant la même préparation même si, au lieu du latin classique, elle est écrite dans un latin abâtardi, influencé par les langues modernes.
La grande majorité de l'œuvre des goliards est composée de poèmes satyriques et mordants, d'autres grossiers, grivois et sans pudeur , même si certains conservent un caractère religieux.

Ils aiment à dépouiller les formes et les symboles de leurs sens primitifs pour mieux les détourner, jouant ainsi avec les contrastes et les oppositions.
Pour de diffuser plus largement leur message évangélique, ils empruntent les formes et les symboles de la culture populaire.
A la liturgie, ils empruntent la forme des cantiques pour mieux dénoncer les abus et l'immoralité des hautes sphères de l'Eglise.

De nombreux thèmes apparaissent dans leurs compositions.
Ils chantent la faiblesse humaine et les plaisirs du moment : le vin, l'ivresse, le jeu, la joie, l'amour profane, le plaisir charnel, l'érotisme et défendent la suprématie de l'intellectuel sur le chevaleresque (dispute clerc/chevalier, la plume contre l'épée).
La nature leur fourni une matière riche : les saisons, la faune, la flore, les changements climatiques et surtout le lune et le cycle lunaire.
Face à la métaphore classique de la culture chrétienne du Soleil symbolisant la clarté divine, les goliards préconisent un culte à la lune qui symbolise le temps qui passe et apprend aux hommes à prendre conscience de l'aspect fugace et vain de la vie.

Musique

Comme ceux des jongleurs, Les poèmes goliards étaient écrits pour être chantés accompagnés de musique.
Du fait de leur plus grande instruction, les étudiants médiévaux pratiquaient la musique avec plus de raffinement encore que les jongleurs .
D'après l'auteur du "Livre d'Alexandre", les sons les plus délicats que l'on puisse imaginer sont ceux produits en "ajoutant aux instruments utilisés par les jongleurs, ceux de plus grand prix qu'utilisent les clercs".
On est très loin d'une connaissance complète de la musique destinée à accompagner ces poèmes ou que ces poèmes étaient censés accompagner.
La notation musicale utilise des neumes dites diastématiques, sorte de sténographie musicale lisible seulement si on a une connaissance préalable de la mélodie. Le style musical des chansons d'amour est similaire à celui des trouvères. On trouve parfois les mêmes airs dans les deux répertoires. Les chansons proprement goliardes sont toutefois plus simples sur le plan métrique, mélodique et stylistique.

Extraits :

Le recueil de textes goliards le plus connu est une compilation d'environ deux cents cinquante textes, écrits la plupart en latin et quelques-uns en allemand, trouvés en 1847 dans l'abbaye Benediktburen en Bavière, et publiée en 1895 sous le titre "Carmina Burana".
Ils sont composés de vers intercalés de refrains, quelques-uns comportent une notation musicale qui a permis de reconstruire la mélodie d'environ quarante chansons.
Le compositeur allemand Carl Orff (1895-1982) s'est servi d'un choix de ces poèmes pour son célèbre oratorium et beaucoup d'entre eux forment encore aujourd'hui la majeure partie des carnets de chants des étudiants allemands.
Le Carmina Burana est habituellement divisé en cinq parties:
- Carmina Moralia et satirica : poèmes moraux et satiriques.
- Carmina amatoria : poèmes d'amour.
- Carmina Potoria : poèmes festifs consacrés à la boisson.
- Ludi : poèmes à caractère sacré, au sens où ils l'entendaient, bien sûr.
- Supplementum: poèmes variés.
Le poème le plus revelateur de la conception vitale spécifique aux goliards et le plus populaire du Carmina Burana, a pour titre son premier vers, comme il est normal dans les Carmina et dans la poésie du Moyen-Âge : In taberna quando sumus... (Quand nous sommes à la taverne... ) .

Les Carmina Buruana sont les textes goliards les plus importants, mais pas les seuls.
Un livre de Chanson de Cambridge existe en Angleterre; un autre à Chalons-sur-Marne en France, un "Carmina Rivipullensia ", d'un moine anonyme de Ripoll, en Catalogne et quelques poèmes du "Libro del Buen Amor" de Juan Ruiz, Archiprêtre de Hita, sont des extraits goliards.

Leur oeuvre influencera des grands écrivains tels que François Rabelais, François Villon,...

L'héritage des Goliards

Libertaires voire libertins, hédonistes voire utopistes, intellectuels contestataires voire revolutionnaires, les goliards sont la source de l'esprit estudiantin moderne.
Je ne sais pas qui a dit : "si la jeunesse n'est pas révolutionnaire, elle n'est ni jeunesse ni rien."
Une chanson résume trés bien leur philosophie de vie, est une version existentielle du déjà très existentiel Carpe diem, elles s'intitule "De brevitate vitae" (De le brièveté de la vie), plus connue par son premier vers: "Gaudeamos Igitur". Elle est devenue l'hymne international des étudiants universitaires.
En proposant le plaisir des sens, ici, maintenant, ils etaient non seulement en avance sur leur temps mais ils l'étaient sur la Renaissance et sur le monde moderne.

XIII° siècle

La naissance de l'Université.

Rappelons le, les Tunas appartiennent au milieu universitaire et ce dés la propre naissance de l'Université.
Mais, au fait, comment est donc apparue notre belle Université?
Contexte historique:

Suite aux grandes invasions la culture classique, grecque et latine, a durablement sombré. Seule l'Église, au fond de quelques monastères, se préoccupe de transmettre un savoir dont la finalité a évolué : refusant la philosophie païenne, les clercs privilégient les textes susceptibles d'une interprétation chrétienne et les exemples de belle langue latine.
Charlemagne et son chancelier Alcuin donnent une impulsion décisive en créant auprès de chaque évêque une "école" destinée à former les cadres de l'Église, donc de l'État, sous l'autorité de son chancelier ou "écolâtre". Le savoir est ainsi lié aux villes, sièges des évêchés, et non plus uniquement aux monastères isolés. Alcuin organise les connaissances de l'époque en deux cycles de trois et quatre disciplines, les "arts libéraux" (ou "arts"), inventant ainsi le trivium (grammaire, rhétorique, dialectique) et le quadrivium (arithmétique, musique, géométrie, astronomie) en usage en France jusqu'à la Révolution, et qui ne sont que l'introduction à l'étude par excellence, celle de la théologie.

Le XIIe siècle se caractérise en Europe par un essor urbain. En se développant, les villes (dont beaucoup conquièrent leurs "franchises", c'est-à-dire un ensemble de libertés qui réduisent leur dépendance par rapport aux seigneurs ou aux dignitaires ecclésiastiques) deviennent les centres d'une vie économique, sociale et culturelle nouvelle.
Les écoles permanentes s'y multiplient. Elles répondent à une nécessité sociale (former des cadres capables de remplir les tâches administratives nouvelles) et à un besoin idéologique (transmettre et enrichir les connaissances, pour une part essentielle héritées de l'Antiquité par l'intermédiaire des Arabes, et mener la réflexion théologique et philosophique qui assure la cohésion de la société).
Grâce à la réputation de leurs professeurs, certaines de ces écoles se font connaître au-delà des limites de leur diocèse, concurrençant les écoles monastiques et attirant des étudiants de tous les pays.
Les étudiants, groupe social à part, indépendants et remuants, se heurtent fréquemment à la justice de l'évêque ou du roi. Les professeurs, quant à eux, entendent : être maîtres du recrutement, se voir garantir une rémunération, pouvoir se doter de statuts et élire des "officiers" qui fassent respecter la discipline intérieure.
Par leur agitation, par des grèves parfois très longues, ils font front à la manière des corporations, ces groupes typiques de la nouvelle culture urbaine alors en plein essor.
C'est de ce mouvement que naissent les premières Universitas Magistrorum ou Scholiarum, "communautés" qui rassemblent la "totalité" des élèves ou des enseignants (les deux termes sont contenus dans le sens du mot latin universitas) : l'Université est née.

L'Université

Cette nouvelle institution à caractère séculier ne désigne que des groupes de personnes et sont d'abord dépourvus de batiments où apprendre ou enseigner.
Elles reçoivent rapidement la protection des monarques, intéressés par la formation de cadres administratifs, et du souverain pontife, soucieux de contrôler la réflexion théologique et philosophique, qui leurs accordent financements, privilèges, franchises et bâtiments.
Cette double protection leur assure une indépendance et une autonomie économique, administrative et juridique vis à vis des pouvoirs civiles et ecclésiastiques locaux.
La pluralité de l'enseignement dispensé et la reconnaissance pontificale des diplômes délivrés confèrent à ces centres d'étude une valeur universelle.
Le latin, instauré comme instrument linguistique d'échange, apporte une certaine unité et facilite la mobilité des maîtres et des élèves, contribuant ainsi au rayonnement de la culture supérieure chrétienne.

Les élèves commençent jeunes, vers quatorze ans, l'étude des arts libéraux. Le trivium, grammaire, rhétorique et dialectique, c'est l'étude des lettres, et avant tout du latin, langue unique des études juqu'au XVe siècle ; puis viennent, regroupés dans le quadrivium, l'arithmétique, la géométrie, l'astronomie, la musique, soit la partie "scientifique"de la vision du monde de l'époque.
Au terme de ces deux ensembles de trois ans chacun, les étudiants, licenciés "es arts", peuvent aborder la discipline de leur choix (médecine, droit) dont l'étude dure encore cinq ou six ans, pour la théologie huit ans sont prévus dans les statuts de l'université de Paris qui en , qui impose, en outre, l'âge minimum de trente-cinq ans pour l'obtention du doctorat ; il semble, en fait, que la durée d'apprentissage ait été de quinze à seize ans.

Venant de tous horizons, les étudiants sont logés dans des "Collèges" et se regroupent en "nation" (du latin natio : lieu de naissance).

Les principales universités :

En 1200, l'Université de Paris dont l'administration dépend de la corporations des professeurs, obtient une charte du Roi Philippe Auguste.
Elle atteind rapidement une renommée considérable surtout pour l'enseignement de la théologie dont elle aura l'exclusivité jusqu'au XV° siècle.
Elle n'atteindra en revanche jamais l'importance de Bologne ou d'Orléans pour le droit, celle de Montpellier ou de Pavie pour la médecine.

À Bologne, dès la première moitié du XIIe siècle, se développe à partir des écoles notariales une université administrée principalement par les étudiants qui choisissent eux-mêmes leurs maîtres, .
Malheureusement, les documents statutaires de l'Université de Bologne de la première moitié du XIII° siècle ont disparus.
Héritière du Droit Justinien, l'Université est spécialisée et reputée pour les études de Droit civil et canon.

À Oxford, en 1214, des écoles existant depuis plusieurs années reçoivent un statut qui leur accorde la garantie de l'autonomie; l'université y est dirigée par un chancelier, nommé par l'évêque de Lincoln, mais choisi parmi les docteurs (ce qui n'est pas le cas à Paris).

Dans nombre de villes importantes apparaissent dès le XIIIe siècle des centres universitaires qui tendent à s'inspirer des modèles de Paris, de Bologne ou d'Oxford.
Certains voient le jour à la suite d'un mouvement spontané, à partir de conditions locales favorables.
Ainsi, à Montpellier, où existait une longue tradition d'enseignement de la médecine, l'université reçoit ses statuts dès 1220.
Dans d'autres cas, des universités résultent de scissions opérées à partir d'établissements existants: à la suite de conflits internes, des maîtres et des étudiants mettent en place une nouvelle corporation universitaire; c'est le cas à Padoue, dont l'université est née en 1222 d'une migration de docteurs et d'étudiants de Bologne.
D'autres universités, enfin, sont fondées grâce à une initiative des pouvoirs papaux, impérial ou royal: l'empereur Frédéric II, régnant sur la Sicile (1197-1250), fonde en 1222 l'université de Naples afin de contrebalancer l'influence de Bologne. À Toulouse, en 1229, le légat du pape impose la création d'une université pour rétablir la foi catholique face à l'hérésie cathare. En Espagne, les rois de Castille et de León sont à l'origine des centres universitaires de Palencia (vers 1210), Salamanque (1218), Valladolid (vers 1240). Mais c'est surtout au cours des siècles suivants que le mouvement de création d'universités par les États prend toute son ampleur, répondant à une politique administrative et culturelle cohérente. Dès les XIVe et XVe siècles, les centres nouvellement institués reçoivent des moyens pour rivaliser avec les universités les plus anciennes.

Les premières Universités espagnoles

La fondation des premières Universités espagnoles date elle aussi du début du XIII° siècle :
- 1208-1214 : Palencia par Alphonse VIII de Castille et l'évèque Tello Téllez à partir de l'école du chapitre.
- 1218 : Salamanque par Alphonse IX de Leon aussi sur les bases de l'école du chapitre préexistante. Bulle d'Alexandre IV en 1255
- 1250 : Valladolid dont le développement est appuyé par les Rois castillans sur les bases d'une école municipale ou abatiale. Bulle de Clement VI en 1346.
- 1279 : Lérida par Jaime II d'Aragon. Bulle papale de 1300.

Des étudiants de tous les royaumes et de toutes conditions vinrent s'y inscrire, dont certains insufflèrent l'esprit des goliards.
Ainsi, pour financer leurs études, les moins fortunés d'entre eux prirent l'habitude d'animer gargotes, tavernes, ruelles et places publiques en échange de quelques monnaies ou d'une assiette de soupe. Ils portaient toujours sur eux une cuillère et une fourchette en bois ce qui leur permettait de manger en quelque endroit où on en leur en donnait l'occasion et leur conféra leur surnom : les "Sopistas" (soupistes). Ces couverts en bois sont aujourd'hui encore le symbole des Tunas universitaires.

Mais si ces sages manifestations à des fins de subsistance étaient bien acceptées par les mœurs médiévales, elles n'étaient que le pendant de manifestations plus friponnes, que seul l'esprit picaresque estudiantin pouvait leur conférer. En effet, la nuit tombée, ces étudiants allaient chanter la sérénade sous les balcons des élues de leur cœur afin de les conquérir, voire plus si affinité.

C'est au XVI° siècle que se formèrent les Tunas telles que nous les connaissons aujourd'hui.
En 1538, une loi permis aux étudiants sans ressources de trouver pension dans les "Instrucciónes para bachilleres de pupillos ". Elles étaient, de par leurs caractéristiques, le refuge des soupistes
Les nouveaux (novatos), à cause de leur inexpérience, y étaient l'objet des moqueries et des farces des anciens. Un pupille se mettait donc sous la protection d'un ancien, qui se chargeait de le guider dans ses études (même si ces pensions n'étaient pas le lieu idéal pour suivre des études sérieuses) et de lui enseigner l'art goliard. En échange, le nouveau devenait le page de son "maître", permettant ainsi à ce dernier d'avoir un style de vie similaire à celui des étudiants riches.
Une fois terminée sa période d'apprentissage, le "novato" atteignait à son tour le status d'ancien bouclant ainsi la boucle et ainsi de suite jusqu'à nos jours.

Au fil de l'Histoire, peu d'institutions ont su préserver aussi fidèlement leurs coutumes et traditions comme l'ont fait les Tunas. L'esprit estudiantin est passé de génération en génération, depuis les premiers soupistes qui devaient survivre grâce à leur art, jusqu'à notre époque, où le caractère initiatique et enrichissant de la Tuna est plus vivant que jamais, n'en déplaise à certains.
Bien sûr, certaines de ces traditions ont évoluées dans leur forme, ont disparu ou ont été créées au fil du temps, mais toutes sont restées fidèles à des idéaux communs :
- Séduire les damoiselles
- Voyager et connaître d'autres cultures
- Obtenir un bon niveau musical
- Porter haut les couleurs de leur Université et de leur Ville où l'aventure les mènent.
- Eventuellement obtenir un diplôme universitaire
Et à certaines coutumes :
- L'apprentissage
- Les Rencontres-Concours (Certamenes)
- La ronda

Les tunos vivent la Tuna comme un art de vivre, c'est la caractéristique qui la distingue de tout autre type de formation musicale ou ludique. Un tuno ne cesse pas de l'être une fois son cursus universitaire achevé, la promesse faite à ses compagnons ou à la Tuna qui lui a donné sa beca est plus comparable à un "pacte de sang" qu'à tout autre forme de promesse. Etre tuno n'est pas quelque chose de transitoire, c'est essentiel à toute personne qui s'en montre fier.

De nos jours, à cause de l'évolution de la société, la Tuna a, certes, quelque peu perdu sa fonction de gagne-pain, les tunos d'aujourd'hui utilisant plutôt l'argent durement gagné pour financer leur équipement (costume et instruments), leurs sorties et leurs voyages, mais elle regroupe toujours des étudiants ("fauchés" par définition) attachés aux traditions, amateurs de musique populaire, cultivant un certain art de vivre, aimant découvrir le monde, l'amour et de nouvelles sensations sans disposer de grands moyens.
Pour ce qui est du reste, la Tuna a su garder vivaces les traditions héritées des siècles antérieurs, elle interprète des chansons populaires avec les mêmes instruments (enfin, dans leur version moderne et neufs), fait la sérénade aux dames (qui sont toujours aussi sensibles à ses chansons), voyage aux quatre coins du monde, le plus souvent invitée par ceux qui veulent bien savourer sa musique et sa sympathie, et dispense toujours sa bonne humeur dans les rues et les restaurants en échange d'un sourire, d'un soupir, d'une petite pièce de monnaie ou d'un coup à boire.

La Tuna est donc plus qu'une formation musicale, c'est l'institution universitaire la plus ancienne et la plus originale au monde.
De nos jours il n'y pas une Université en Espagne qui n'aie une Tuna.
La Tuna n'est rien sans l'Université mais l'Université ne serait pas ce qu'elle est sans la Tuna.
Son romantisme, son caractère si particulier, ses traditions, et surtout sa musique en font un élément indissociable de l'Histoire de l'Université espagnole.
La Tuna a été, est et sera toujours.

¡ Aúpa Tuna !


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